Après le traditionnel "soufflez dans le ballon", les conducteurs auront bientôt droit à un "ouvrez grand la bouche". D'ici la fin de l'année, en effet, une nouvelle méthode de contrôle anti-stupéfiants sera expérimentée dans plusieurs départements de France, a annoncé jeudi le délégué interministériel à la sécurité routière, Jean-Robert Lopez. Plus simple, plus rapide et moins coûteuse, elle devrait être à terme généralisée sur le territoire.

Le dispositif actuel de test salivaire est en effet contraignant : la police effectue un premier dépistage sur le conducteur. Si ce dernier est positif, les forces de l'ordre doivent alors l'accompagner jusqu'à un hôpital afin de faire un prélèvement sanguin, qui confirme ou infirme la présence de stupéfiants. Problème : ce dispositif est coûteux (environ 50 euros par prise de sang) et chronophage : "Les forces de l’ordre suspendent leurs opérations de contrôle sur d'autres automobilistes pour escorter la personne à l’hôpital, faire sa prise de sang puis revenir", nous explique la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca).


"Fumer une heure ou deux jours avant de conduire, c'est pareil"



Désormais, l'analyse se fera intégralement au bord de la route : si le premier test salivaire est positif, les forces de l'ordre procéderont à un deuxième test salivaire qui sera envoyé directement au laboratoire. "Une économie de temps, de moyens humains et financiers", résume la Mildeca, qui permettra de multiplier les tests. L'an dernier, sur 144.000 dépistages pratiqués, environ 47.000 (33%) se sont révélés positifs. C'est beaucoup plus qu'en 2012 (16.300 condamnations), mais dix fois moins que l'alcool, testé de façon plus régulière.

En donnant un coup d'accélérateur dans la lutte contre le cannabis au volant, le ministère de l'Intérieur espère faire baisser significativement la mortalité routière. En 2013, 23% des conducteurs impliqués dans des accidents mortels présentaient des traces de stupéfiants dans le sang. "Cannabis et volant font très mauvais ménage, nous assure Laurent Karila. Il multiplie par 1,8 les chances d'avoir un accident (contre 8,5 pour l'alcool, ndlr)". Le médecin, vice-président de SOS addictions, espère que la généralisation des tests anti-cannabis "aura le même effet dissuasif que les contrôles d’alcoolémie" et "sensibilisera les consommateurs aux dangers de la conduite avec du cannabis". "Avec ces tests salivaires qui viennent simplifier la donne, on va pouvoir procéder à des contrôles ciblés qui permettront assurément de faire baisser la courbe de l’accidentalité", se réjouit de son côté l'association "40 millions d'automobilistes".

Les jeunes sont la cible prioritaire de cette mesure. En effet, selon le Bilan 2012 de la sécurité routière en France, 50% des conducteurs sanctionnés pour conduite sous l’emprise de stupéfiants ont moins de 25 ans. A noter également que les hommes représentent 96% des fumeurs de cannabis au volant. Ces derniers s'exposent à des sanctions sévères : "2 ans d'emprisonnement, 4.500 euros d'amende et six points de permis", nous détaille la Mildeca. Et "peu importe si le joint a été fumé deux jours ou deux heures avant", poursuit-on au ministère : "Au regard de la loi, si le test est positif, il s'agit de la même infraction". De quoi en dissuader plus d'un.