Hier l’assemblée nationale a adopté un amendement de l’article 323-1 de la loi Godfrain du 5 janvier 1988. La disposition, clairement étiquetée « Police et sécurité : dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme» consacre
habilement Internet comme un outil de terreur. Le tout a bien
évidemment été voté en procédure accélérée pour prendre soin d’éviter
tout débat. Une loi de police, ça ne se discute pas, c’est pour votre
sécurité.
La justification de cet amendement que l’on passe dans le bundle « antiterroriste », c’est … « (…) chaque année des centaines de milliards d’euros de pertes pour les entreprises.»… avec des « centaines de milliards » de préjudice, on peut au bas mot parler de terrorisme économique. C’est amusant car les derniers DSI que j’ai rencontré n’avaient pas franchement l’air terrorisés. Si vous avez vous même croisé un DSI terrorisé, n’hésitez pas, demandez lui de nous écrire un petit mail à cette adresse jesuisvachementcyberterrorisé@reflets.info, nous avons plein de questions à lui poser.
Sur le contenu au final, c’est toujours la même chose. En théorie,
tout ceci reste bien soumis à une intrusion. En théorie car le texte ne
vient évidemment pas définir la notion d’intrusion dont l’évaluation
technique est toujours laissée à la discrétion d’un juge.
Exemple :
« vous avez accédé à la page Facebook de monsieur toto qui assure que sa photo de vacances en tongs est privée même si elle est publiquement visible de tous, et comme il y a une authentification sur la page d’accueil de Facebook alors vous êtes coupable d’une intrusion terroriste et il vous en coûtera 375 000 euros d’amende ».
Petites subtilités cependant, la détention de données « supposées » issues d’un piratage (par exemple trouvée sur Pastebin
ou sur une clé USB dans le métro), vous en coûtera elle aussi 375 000
euros d’amende… une peine pour tout et n’importe quoi au moins c’est
simple à retenir pour tout le monde… Le copier coller.. c’est 375 000
aussi, l’envoi d’une URL par mail, c’est de la transmission terroriste…
paff 375 000 euros. Bref si vous trouvez des données, surtout, ne dites
RIEN.
Vous voulez signaler un trou de sécurité sur un .gouv.fr parce que ce
dernier n’a pas les budgets nécessaires à sa mise à jour et pisse des
données ? Alors pour vous c’est le jackpot… 500 000 euros ! Moralité…
surtout on la ferme et on les laisse se démerder. Peu importe si ceci
est déjà indexé par des moteurs spécialisés et visible de tous, car le
simple fait de faire un ctrl+f pour chercher les occurrences de .gouv.fr
dans cette liste est probablement un acte terroriste.
Dernier point, si vous êtes journaliste, vous êtes désormais assimilé
terroriste, donc vous pouvez probablement vous asseoir 2 fois sur le
secret de vos sources terroristes… Tout va bien.
Mais le problème n’est pas tant sur le fond que sur la forme, une
forme qui renvoie irrémédiablement au fond. Pourquoi amender la loi
Godfrain dans le cadre de dispositions relatives à la lutte contre le
terrorisme ?
C’est un travail de longue haleine, mais pour se doter de joujoux
sympas, encore faut il avoir les outils légaux légitimant l’usage
d’outils aujourd’hui interdits. En consacrant Internet comme un outil de
terreur, l’exécutif fait un pas de plus vers la légitimation d’outils
de surveillance plus massifs, descendant au plus bas de vos échanges. Si
Internet est un outil de terreur, alors il convient de l’aborder avec
des outils qui tiennent plus du filet dérivant que du casier à
langouste.
Les mauvaises langues comme Reflets y voient un dangereux
glissement visant à faire accepter dans l’esprit de tous que comme
Internet est un outil terroriste, alors il est nécessaire de le placer
sous surveillance, ce de la manière la plus large possible. La
confidentialité des échanges ne pèse plus lourd quand la loi vous
qualifie de terroriste.
Dormez tranquilles, il ne nous reste plus qu’à docilement attendre la
criminalisation des outils de chiffrement des communications et
d’anonymisation comme Tor.
LE WERWOLF
Reflets :: Lien
Repéré par : Le Vieux Loup


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